LES OBLIGATIONS MILITAIRES AVANT 1914
La loi du 21 mars 1905 (loi Jourdan-Delbel) mit fin au tirage au sort et imposa
un service militaire personnel et obligatoire pour tous d’une durée de 2 ans
(au lieu de 3 depuis 1889). Toute dispense était exclue.
Mais suite à la loi du 7 août 1913 sur le service militaire, tous les hommes non
exemptés durent dorénavant effectuer un service de 3 ans dans l’armée active.
Les jeunes gens libérés devenaient réservistes pendant 11 ans. Les officiers de
réserve avaient la possibilité de participer à des périodes annuelles de quinze
jours en contrepartie de la perception d’une solde.
Ils étaient ensuite affectés à l’armée territoriale durant 7 ans(1).
Ils passaient dans la réserve de l’armée territoriale durant 7 autres années
avait d’être libérés.
Cela faisait tout de même 28 années d’obligations militaires !
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ORGANISATION DE L’ARMÉE EN 1914
Armée active, les hommes nés en 1891, 1892 et 1993 : classes 1911, 1912 et
1913 >>>> 880 000 hommes
Ces trois classes sont déjà dans les dépôts et casernes lorsque la guerre est
déclarée (la classe 1913 ayant été appelée par anticipation alors qu’elle n’aurait
dû partir qu’à l’automne).
Les hommes de la classe 1911 avaient été incorporés en octobre 1912 avec une
mise en congé prévue en novembre 1914. Cette dernière ne fut pas appliquée
étant donné l’état de guerre. Leur démobilisation aura lieu en août 1919 (après
huit ans sous l’uniforme !), avec une libération des obligations militaires en
septembre 1939.
Réserve de l’armée active, les hommes nés entre 1890 et 1881, classes de
1910/1909/1908/1907/1906/1905/1904/1903/1902/1901
(1) Celle-ci, comme la réserve de l’armée territoriale, n’était constituée que durant une mobilisation
Les régiments de réserve se rattachaient aux régiments d’active dont ils
prenaient la numérotation augmentée de 200 (ainsi le 1er RI devenait pour les
réservistes le 201ème RI). Cependant, très rapidement on employa les régiments
aux mêmes fonctions et il n’y eut plus de différence entre les différentes unités.
Armée territoriale, les hommes nés entre 1880 et 1875, classes
1900/1899/1898/1897/1896/1895
Réserve de l’armée territoriale, les hommes nés entre 1874 et 1869, classes
1894 /1893/1892/1891/1890/1889.
Cette réserve de la territoriale ne sera incorporée qu’à partir du 16 août.
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Les classes suivantes furent appelées au fur et à mesure. Ces plus jeunes
classes (1914/1915/1916/1917/1918/1919) seront toutes incorporées par
anticipation.
Classe 1914, fin août-début septembre 1914
Classe 1915, décembre 1914
Classe 1916, avril 1915
Classe 1917, janvier 1916
Classe 1918, avril-mai 1917
Classe 1919, avril 1918
La classe 1914 sera la classe des « sacrifiés ». Moins aguerrie que les
classes 1911/1912/1913, déjà sous les drapeaux au titre du service militaire de
trois ans, la classe 1914 subira le choc des premiers mois de la guerre (offensive
à outrance) et sera mobilisée pendant tout le conflit.
La classe 1917 (mobilisée à partir de janvier 1916) fut moins longtemps exposée
et eut trois fois moins de pertes.
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Enfin, le ministère de la Guerre engage une politique de récupération des
exemptés, réformés et ajournés conduisant au renforcement systématique du
principe d’universalité et d’égalité de la conscription. Des décrets et des lois,
comme les lois DALBIEZ du 17 août 1915 et du 20 février 1917, permettent
d’examiner une nouvelle fois des hommes qui avaient été écartés, parfois quinze
ou vingt ans auparavant, de leurs obligations militaires. Cela permet de
récupérer 1 187 497 hommes des classes antérieures à 1914 et 335 987 hommes
pour les classes 1914 à 1919.
Au total, pour la France, ce seront 8 000 000 hommes, entre 20 et 50 ans,
qui seront mobilisés
LE DÉPART
Toutes les chroniques assurent que, le premier août 1914, le temps était
lourd, sans vent. Tous les villageois de France étaient occupés par la moisson(2).
lorsque vers cinq heures du soir(3), ils furent avertis, par le son de la cloche (le
tocsin), que la mobilisation générale était décrétée. Quelques instants
auparavant, les gendarmes(4) étaient venus apporter la nouvelle aux Maires : un
télégramme émanant de la Préfecture. La nouvelle fut aussitôt confirmée par le
tambour du garde-champêtre.
L’affiche de mobilisation(5) fut placardée :
premier jour de mobilisation, le dimanche 2 août 1914.
La première impression fut, pour tout le monde, une profonde
stupéfaction car personne ne croyait la guerre possible. Les villageois ne
quittaient guère leurs villages ou leurs régions. Ils n’étaient pas vraiment au
courant de la dégradation de la situation internationale, car il n’y avait ni
téléphone, ni radio, ni télévision ; seuls les journaux diffusaient les nouvelles du
monde à ceux qui s’y intéressaient.
Néanmoins, les jours suivants, les départs s'effectuèrent avec la plus
grande régularité. Les femmes retrouvèrent leur calme et les hommes partirent à
regret mais pleins d’enthousiasme.
Il n’était d’ailleurs pas question de ne pas se présenter :
« Tout militaire dans ses foyers, rappelé à l’activité, qui, hors le
cas de force majeure, n’est pas arrivé à destination au jour fixé par
l’ordre de route régulièrement notifié, est considéré comme insoumis,
après un délai de trente jours, et puni des peines édictées par l’article
230 du Code de justice militaire. »
(2) En 1914 la moisson passait par plusieurs étapes : le fauchage proprement dit avec la mise en javelles et gerbes,
le stockage en gerbiers et enfin le piquage en battage. En 1914, dans la grande diversité des terroirs, on battait
encore au fléau mais, par endroits, les premières batteuses étaient apparues…
(3)
Plusieurs notes évoquent le début du tocsin à 16 h (l’heure légale, unique pour tout le territoire national était
récente ; elle fut fixée par un décret de 1911) et d’autres parlent de 21 h. Les télégrammes des préfets furent bien
adressés aux maires peu avant 16 heures mais la France de 1914 était lente. Quelques territoires furent, en effet,
seulement touchés en fin de journée.
(4) Au début du XXème siècle, les gendarmes se déplaçaient à cheval ou à vélo. C’est seulement le 31 décembre
1937 que la gendarmerie à cheval fut supprimée !
(5) Il n’y est pas question de guerre : la guerre ne sera déclarée à l’Allemagne que le 3 août.
Ordre